LE RYMMERLAND

Bloody Mary : un cocktail de légendes

Elle est évoquée parfois dans certains/es séries et films américains ou anglo-saxons, généralement sous la forme d’une bande d’adolescents qui se met devant un miroir après avoir allumé quelques bougies et commence à prononcer son nom. Si vous ne voyez pas de qui je parle, vous la connaissez peut-être pour avoir vu son nom à la carte d’un bar à cocktails. Je parle bien de Bloody Mary, alias « Marie la sanglante« . Si vous comptiez sur moi pour enfin connaître la véritable histoire à l’origine du mythe, c’est en partie raté. En effet, de nombreuses théories existent sans qu’aucune ne puisse prétendre avec certitude avoir donné naissance à la légende. On ne sait d’ailleurs même pas si le cocktail alcoolisé est lié au mythe ou non. Dans les 2 cas, s’amuser à pister l’origine de Bloody Mary donne lieu à des anecdotes et des récits qui sont bien agréables (ou pas) à découvrir.


LE COCKTAIL ROUGE


Hemingway et sa « maudite épouse »

Ernest & Mary Hemingway

Dans cette version, le breuvage aurait été inventé en France au cours du XXème siècle à la demande du célèbre écrivain Ernest Hemingway. Ce dernier était alors marié à Mary Welsh Hemingway qui ne voulait pas qu’il boive. Il aurait alors commandé à un barman un cocktail qui n’ait pas d’odeur afin de ne pas éveiller la suspicion de son épouse, qu’il surnommait à l’époque « maudite Mary« . La couleur rougeâtre de cette boisson à la tomate et le surnom qu’il donnait à sa femme lui auraient donc donné son nom. Je précise cependant qu’en fonction des sources, l’enseigne et la localisation du bar, ainsi que l’identité du barman à l’origine du cocktail diffèrent, ce qui rend l’anecdote peu fiable, du moins dans ses détails.

Pas de miroir ni de fantôme donc dans cette théorie. On ne parle que du cocktail, à moins d’envisager que madame Hemingway s’amuse à hanter quelques menteurs alcooliques qui oseraient prononcer son nom un soir de beuverie 😆. Mais celles qui vont suivre évoquent des personnages historiques un peu plus sanglants que ce pauvre soiffard d’Ernest.

Larguez les amarres : quand Mary rencontre Bonny aux Caraïbes

Mary Read – Gravure d’Alexandre Debelle

Dans mes recherches, je suis tombée sur un article évoquant l’idée que ce fameux cocktail épicé à la tomate porterait son nom en hommage à la pirate Mary Read du XVIIème siècle. En l’absence de source catégorique, cela reste une information à prendre à la pincette (et puis le Bloody Mary est à base de vodka, et non de Rhum… C’est de l’hérésie pour un pirate, ça… Non ?! 😝 ). J’ai trouvé cependant l’histoire de cette rebelle des Océans particulièrement passionnante, et qui mérite d’être raconté. Cela m’a rappelé mes années de jeux de rôles sur table, quand je faisais rouler mes dés à 10 faces pour incarner mon personnage, une femme sorcière et pirate évoluant dans l’univers médiéval fantastique de Seventh Sea (Les secrets de la septième mer).

A la mort de son père, la jeune Mary Read est contrainte de se travestir en homme afin que sa mère puisse continuer de percevoir le soutien financier de sa belle famille. C’est donc sous le nom de Willy Read qu’elle prend une première fois les flots en s’engageant dans l’armée maritime Britannique pour voguer sur les mers de l’Europe. Lorsqu’elle tombe amoureuse d’un Maréchal des logis, Mary reprend son apparence féminine pour l’épouser. Ils quittent alors l’armée pour ouvrir une auberge aux Pays-bas. Mais l’idylle prend fin 3 ans plus tard, au décès de son mari. Willy Read fait alors son grand retour et est engagé sur un navire marchand Hollandais. Lors d’une attaque par des pirates anglais, elle partage une première courte expérience dans les rangs de la piraterie, qui prend fin après avoir obtenu le pardon royal. Willy retourne sur les mers quelques temps en tant que Corsaire pour l’Angleterre, mais l’équipage du bateau finit par se mutiner.

Au cours d’une escale à New-Providence, elle fait la rencontre du célèbre pirate Jack Rackam, capitaine du Revenge, et d’Adam Bonny, un membre de son équipage. Rapidement, Willy et Adam se nouent d’amitié. Les 2 complices se révèlent en effet mutuellement leurs véritables identités : Mary Read et… Anne Bonny.

Si Anne se travestit également, elle n’a pas eu à le faire par nécessité, comme cela a été le cas pour Mary. Femme issue d’un milieu aisée, son caractère bien trempé et sa soif d’aventure l’ont conduit à prendre les habits d’hommes pour vivre libre et échapper au rôle que la société imposait aux femmes à cette époque. Elle a trouvé dans la piraterie une « famille » à l’esprit moins étriqué : l’équipage connait en effet sa véritable identité et l’a accepté dans ses rangs, malgré le code qui interdit pourtant les femmes à bord.

Mary fait cependant le choix de conserver sa véritable identité secrète. Cela crée d’ailleurs quelques tensions sur le navire : Anne étant amante de Jack Rackam, certains la trouvent un peu trop proche de ce Willy Read. Le capitaine aurait même menacé Willy/Mary de lui trancher la gorge…

Anne Bonny et Mary Read (Bahamas)

Les 2 femmes parcourront ensemble les mers caribéennes pendant quelques années, prenant les armes et pillant comme leurs confrères masculins. La légende dit qu’elles criaient à leurs ennemis « battez vous comme des hommes » et que Mary aimait révéler son genre avant de tuer ses victimes, afin de leur prouver qu’une femme pouvait combattre aussi bien qu’un homme avant qu’ils ne lâchent leur dernier soupir.

Leurs années de piraterie prendront fin lorsque l’équipage sera capturé par les troupes du gouverneur de Jamaïque. Mary et Anne échapperont à la pendaison en avouant être enceintes. Mary décèdera cependant en prison quelques semaines plus tard d’une maladie ou d’une fausse couche. Elle était âgées alors d’à peine une trentaine d’années. Quand à Anne, ce qu’elle est devenue est resté mystérieux. Certaines rumeurs disent que son père aurait payé sa rançon et qu’elle aurait repris une vie traditionnelle de femme. D’autres prétendent qu’elle aurait retrouvé son premier époux, James Bonny.

Je sais pas vous, mais moi, je trouve que ces deux femmes méritent qu’on trinque à leur santé ! Elles ne sont peut-être pas à l’origine du Bloody Mary, mais si un gros macho sexiste veut bien se prêter à l’expérience de prononcer leur nom 5 fois devant un miroir, elles pourraient peut-être lui réserver quelques « bloody » surprises 😈 !

Marie Tudor : cinglante et sanglante

Surnommée « Marie la sanglante« , Marie Tudor a été la première femme à gouverner l’Angleterre au XVIème siècle. Elle est née en 1516 de l’union d’Henry VIII et de Catherine d’Aragon.

Queen Mary Tudor

Sa montée sur le trône ne fut pas aussi évidente qu’on pourrait le croire : si son père l’a honoré du titre de Princesse de Galles dès ses premières années, le roi n’en n’était pas moins dans l’attente d’un futur héritier, ce que sa première épouse Catherine ne lui donna pas. Au début des années 1530, alors que Marie souffrait de quelques problèmes de santé et d’épisodes dépressifs, son père lui interdit de revoir sa mère, qu’il envoya vivre à l’écart. En 1533, après avoir réussi à faire annuler ce premier mariage, le roi épousa Anne Boleyn, destituant ainsi Catherine d’Aragon de son titre de reine, et reléguant Marie au rang d’enfant illégitime. La jeune fille alors âgée de 17 ans se rebella, refusant de reconnaitre cette nouvelle épouse comme étant sa reine. Son père la nomma alors Dame d’honneur d’Anne Boleyn pour la ramener à la raison. Leurs liens ne s’arrangèrent pas lorsque sa mère décéda en 1536, sans qu’elles n’aient pu se revoir. Le second mariage royal ne dura que 3 ans, jusqu’en 1536, quand Henry VIII fit décapiter Anne Boleyn et prit pour nouvelle femme Jeanne Seymour. Il obligea alors Marie à signer un document dans lequel elle dut reconnaitre sa nouvelle compagne comme étant la reine et accepter ainsi sa propre illégitimité. La jeune fille retrouva ainsi sa place à la cour malgré son statut illégitime, et le couple donna naissance à Edouard VI en 1537, dont l’accouchement causa la mort de sa mère quelques semaines plus tard. Henry VIII, n’appréciant de toute évidence pas le célibat à long terme 😁 , connut ensuite un mariage éphémère avec la princesse Anne de Clèves, union qui fut annulée quelques mois plus tard. Il prit alors pour épouse la jeune Catherine Howard en 1540, qu’il fit exécuter par décapitation 2 ans plus tard pour trahison et adultère. Ce fut à l’occasion de son sixième et dernier mariage, avec Catherine Parr, que le roi se réconcilia avec ses enfants, accordant ainsi à Marie et sa sœur Elisabeth la légitimité de sa filiation.

Edouard VI était donc l’héritier direct du trône quand Henry VIII trouva la mort en 1547. Il était alors âgé de seulement 10 ans lorsqu’il succéda à son père. Le pouvoir fut donc exercé par un conseil de régence protestant, alors que Marie restait fidèle au catholicisme. La demoiselle attachée à sa religion tenta d’user de son pouvoir diplomatique pour garder le droit de l’exercer et continua de célébrer la messe traditionnelle dans sa chapelle. Les tensions entre Marie et son demi-frère persistèrent jusqu’à la mort de ce dernier d’une infection pulmonaire en 1553. Afin de s’assurer que le royaume reste dans le protestantisme, le jeune roi avait prit soin, avant de rendre l’âme, de rédiger un testament qui destituait ses 2 sœurs de l’accès au trône et désigna une certaines Jeanne Grey pour lui succéder. Mais le jour même de sa prise de pouvoir, une lettre de Marie parvint au Conseil privé afin de faire reconnaitre ce testament comme étant un acte de trahison. Grâce à la pression d’une armée rassemblée par ses partisans, Jeanne fut immédiatement destituée et Marie fut proclamée reine.

Les premières actions de Marie Ière furent de libérer les conseillers catholiques qui avaient été emprisonnés à la tour de Londres. Il lui fallut également rapidement trouver un époux afin d’engendrer un héritier et ainsi empêcher que le royaume ne retombe dans le protestantisme par le bais de sa sœur Élisabeth. Le choix de prendre le prince Philippe d’Espagne pour époux fut stratégique. Si ce mariage était mal perçu auprès de l’opinion publique, suscitant la crainte de voir l’Angleterre tomber sous le joug d’Habsbourg, Marie craignait qu’en épousant un anglais, elle ne perde sont statut gouvernemental au profit de son mari, qui, en devenant roi, risquerait de régner à sa place. Un contrat de mariage fut rédigé afin de préserver le pouvoir de la reine et d’empêcher que Philippe ne conserve son statut de roi en cas de décès de cette dernière (et vu la vitesse à laquelle les têtes tombaient à cette époque, valait mieux s’y prendre tôt… 😏 ).

C’est notamment en raison de ce qu’a engendré la politique religieuse de Marie Tudor qu’on lui prêta le surnom de Bloody Mary, la « Marie sanglante« . Si, dans un premier temps, Marie confia à son peuple ne pas vouloir imposer à quiconque de suivre sa religion, elle œuvra politiquement pour réconcilier l’Angleterre avec Rome, abroger les lois religieuses instaurés par ces prédécesseurs Edouard VI et Henry VIII, et réussit à ramener l’Église d’Angleterre sous la juridiction du Vatican. Les lois sur les hérétiques furent ainsi rétablies au Royaume. Marie Tudor fut alors à l’origine des persécutions mariales : les protestants avaient le choix entre l’exil, la conversion ou la punition. Près de 284 protestants furent exécutés, brûlés vifs, pour avoir été reconnus coupable d’hérésie.

Malgré son impopularité, Marie Ière maintint cette politique barbare jusqu’à son décès en 1558. Elle ne laissa pas d’héritier derrière elle, n’ayant connu que 2 grossesses nerveuses, causant la contrariété de son mari Philippe, qui se montra très peu présent aux côtés de la reine durant son règne. Elle nomma ce dernier régent dans son testament et fut contrainte, en l’absence d’héritier, de se résoudre à accepter que sa sœur Élisabeth lui succède.

Alors… Cela vous a-t-il donné envie de siroter le cocktail en pensant à cette charmante dame ? Si elle a été la cause de choses pas très « jojos« , je la trouve pas si « sanglante » que ça moi… Du moins comparé à son paternel qui semblait apprécier le divorce par décapitation… 🙄

Une autre piste ?

Certaines sources se demandent si la boisson rouge ne serait pas un « hommage » à Elisabeth Bathory, une « Comtesse sanglante » Hongroise qui a également nourrit pas mal de mythes vampiriques. Bien qu’il ne soit pas question de « Bloody Lisa » dans notre folklore, ce personnage historique mérite le coup d’œil. Je vous invite donc à rendre une petite visite au blog de Deadhunter qui a rédigé un article très complet sur la dame qui aimait se détendre dans un bon bain de sang de vierges (sympathique la nana…😨 ).


LE SPECTRE SANGLANT


Bloody Mary par Serafin ureno

Mes recherches pour trouver au moins un unique récit récurrent à l’origine du rituel au miroir qui invoque notre Bloody Mary m’ont rapidement fait comprendre qu’il n’existe en réalité aucune Mary potentiellement à l’origine de la légende. Elle peut aisément être celle que vous désirez. Vous pourriez donc vous-même donner naissance à une nouvelle hypothèse de la légende urbaine qui, dans quelques décennies, serait considéré comme étant la véritable histoire de cet esprit mystérieux par certains… Elle a une identité différente selon les versions (folkloriques ou fictions) : Mary Whales, Mary Worth, Mary Agana, Mary Mumford… Selon les décennies, les sources, les régions du monde, la légende originale fait référence à une sorcière, une meurtrière infanticide, une femme victime d’une fausse-couche ou dont l’enfant aurait été tué injustement… Elle s’incarne aussi parfois dans d’autres légendes urbaines locales de certains pays par le biais du rituel au miroir.

C’est assez amusant de se dire qu’une légende peut traverser les âges uniquement à partir d’un simple surnom, et se réinvente à l’infini, influencée par les époques, un contexte historique ou social. Elle enfante des milliers de versions d’elle-même sans même être née. C’est un comble ! J’y vois un peu le spectre d’une infinité d’esprits créatifs, d’auteurs passifs qui s’écrivent en tête leur propre histoire à partir de ces 2 mots. Inspirés inconsciemment par des personnages historiques, des drames, de faits divers, mais aussi par des coutumes festives, religieuses ou non, comme Halloween, l’Épiphanie… La fiction, le divertissement ont aussi une influence passive sur le mythe. Je suis tombée sur un récit d’un blog qui pensait raconter la légende alors qu’il narrait sans le savoir une mise en scène organisée pour le « Halloween Horror nights », un événement annuel organisé par les studios Universal depuis 30 ans.

Plutôt que de narrer quelques versions anglo-saxonnes ou américaines de Bloody Mary, je me suis intéressée aux variantes brésiliennes et nippones de cette légende, assez proches entre elles et peut-être plus méconnues.

LA LOIRA DO BANHEIRO : une « Maria Sangreta » brésilienne

Illustration par Leila Lil

En Europe et en Amérique du nord, nous connaissons principalement le rituel pour invoquer Bloody Mary de cette manière : il faut se placer devant un miroir (en général dans la salle de bain), allumer quelques bougies et éteindre la lumière. Puis on commence à prononcer son nom 5 fois ou 13 fois selon les versions. Certains prétendent qu’il faut ajouter « I killed your baby » (Trad: j’ai tué ton bébé), faisant alors référence à une version où la colère de Mary serait née à la suite de la mort de son enfant dans un accident de voiture.

Dans cette version brésilienne, il suffit de prononcer son nom 3 fois dans des toilettes puis de donner un coup de pied pour la faire apparaitre. Petite particularité cependant, le rituel ne peut se faire que dans une école (même s’il existe des variations en fonction des régions du pays… Décidément, elle est chiante à joindre cette Mary 😖 ).

Mais qui est donc cette Mary brésilienne qui ne squatte que les chiottes des établissements scolaires ?

Portrait de Maria

Il s’agirait d’une certaine Maria Augusta de Oliveira, née dans une famille aristocratique de Sao Paulo vers la fin du XIXème siècle. Cette jeune fille, contrainte à 14 ans d’épouser un homme influent, décide à 18 ans de se soustraire à ses obligations et met en vente ses bijoux pour s’enfuir à Paris. 8 ans plus tard, sa famille apprend la mort de la jeune femme sans que la cause ne soit connue. Le certificat de décès est lui-même mystérieusement porté disparu. Ses parents demandent le rapatriement du corps. La défunte est conservée sous verre dans la propriété familiale le temps que la tombe soit préparée. Sa mère commence alors à faire d’horribles cauchemars jusqu’à l’inhumation de sa fille.

En 1902, le manoir est transformé en école publique. Les rumeurs commencent alors, comme quoi un esprit hanterait les lieux, plus exactement les toilettes de la bâtisse. Un incendie d’origine inconnu se déclare en 1916, attisant encore davantage le mythe. Par la suite, les responsables du lycée utilisèrent cette histoire pour effrayer les écoliers et maintenir l’ordre dans l’institution. La rumeur se popularisa, jusqu’à devenir légende.

Au Brésil, la biographie de Maria Augusta de Oliveira continue d’être étudiée. Au delà de son mysticisme, son histoire et sa personnalité transgressive reflètent la naissance d’une société plus flexible, plus innovante, se confrontant à un environnement jusqu’alors très patriarcal à cette époque.

HANAKO-SAN : Ne pas déranger, c’est occupé !

Toire no Hanaoko-san (illustration de IssyBJD)

On reste dans les toilettes d’écoles ! Mais cette fois, on décolle pour le Japon, ce pays riche en mythes et légendes nourries de son histoire, de la pluralité des religions et des croyances animistes nippones.

Quand on évoque les toilettes japonaises, on pense généralement à l’amusante expérience de les utiliser : sièges chauffants, jets de lavages… Le « carwash des fesses » (avec supplément lustrant pour les faire briller ? 😅 ) ! Cette pièce n’est pourtant pas si accueillante du point de vue de tous au Pays du Soleil Levant et les superstitions qui la concernent vont parfois même jusqu’à impacter le quotidien de certains établissements.

Cela a été le cas dans beaucoup d’écoles japonaises au début des années 80, période qui semble marquer la naissance de la légende autour d’Hanako (bien que certaines sources prétendent que le mythe est apparu dans les années 50). Les toilettes du 3ème étage étaient précautionneusement évitées par crainte d’y croiser le fantôme de cette jeune demoiselle.

Représentation typique d’un Yurei

La légende varie d’une région à l’autre. Hanako-san (Trad: demoiselle Hanako) prendrait l’apparence d’une jeune écolière en uniforme, avec une jupe rouge et la coupe au carré dans certaines versions. Dans d’autres, elle porterait une longue robe blanche et de longs cheveux noirs, les bras ballants, ressemblant alors à ce qu’on appelle un yurei dans la culture japonaise (les yurei sont des âmes de défunts qui sont partis dans le chagrin, la colère, le regret et continuent d’errer dans le monde des vivants au lieu de monter au paradis. Ces âmes sont traditionnellement dépeintes depuis plusieurs siècles avec de longs cheveux noirs et une longue robe flottante sans pieds. On retrouve notamment cet archétype dans la mouvance cinématographique qui s’est popularisée au reste du monde dans les années 2000, avec des films comme Ring, Ju-on etc.).

La superstition précise qu’il ne faut pas prononcer son nom 3 fois devant le miroir des toilettes situées au 3ème étage d’un établissement. Certaines variantes conseillent également de frapper 3 fois à la porte des toilettes avant de les utiliser et de demander : « Es-tu là, Hanako-san ?« . Et bien évidemment, si elle vous répond, il est vivement recommandé de ne pas la déranger davantage (moi, je la comprends Hanako ! Qui aime se faire embêter quand il fait popo ? 🤬 ). La demoiselle aurait cependant pour réputation d’être plutôt pacifique, se contentant de hanter les latrines, tant qu’on ne la provoque pas.

Ses origines proposent plusieurs scénarios : Hanako serait une jeune fille tuée par un bombardement pendant la seconde guerre mondiale alors qu’elle jouait à cache-cache dans son école. D’autres disent qu’il s’agirait d’une adolescente harcelée par un proche (famille ou professeur). Elle aurait tentée de s’en protéger en se réfugiant aux toilettes mais son bourreau l’aurait retrouvé et assassiné. On évoque aussi parfois le suicide d’une écolière. A Yamagata, Hanako-san serait un lézard à 3 têtes de 3 mètres de long qui attirerait les enfants dans les canalisations en prenant la voix dune petite fille (y’a pas d’lézard ! Euh… si… merde…). A Kurosawajiri, se serait une main blanche qui sortirait du trou d’évacuation des toilettes pour attraper sa proie si vous l’appelez trois fois.

Certaines rumeurs invitent les élèves qui se retrouveraient devant Hanako à lui présenter ses devoirs bien notésTiens donc… Un fantôme qui se préoccupe des résultats scolaires des étudiants… C’est pratique et original comme méthode éducative (mais pas très sympa pour ceux qui connaissent quelques difficultés scolaires… 🤨 ) !

D’autres mythes s’inspirent ou présentent des similitudes avec Hanako-san. Ainsi, Akai Kami, Aoi Kami (Trad : papier rouge, papier bleu) se présenterait cette fois sous la forme d’un petit garçon qui hanterait les toilettes des filles en tenant dans chaque main un papier de couleur différente. Selon le choix de sa victime, le rouge engendre sa mort par un sabre, le bleu par pendaison.

Pour conclure, si vous ou l’un de vos enfants est amené à faire vos études au Japon, prévoyez un paquet de couches, c’est peut-être plus prudent !

L’histoire est du vrai qui se transforme,

la légende du faux qui s’incarne.

Jean cocteau

Toute plaisanterie mise à part, s’intéresser aux légendes du monde en fonction des cultures de leur pays d’origine met parfois en avant bien des choses. Certaines proviennent d’une réalité historique, d’autres n’incarnent que nos peurs inavouées. Les légendes sont aussi des contes dans lesquels peuvent se cacher un message, une morale, voire un outil éducatif. On peut trouver tout un tas de symbolisme à travers les différentes versions de Bloody Mary : de la plus archaïque à la plus poétique, du rite initiatique de passage à l’âge adulte (test de courage en lien avec les peurs de la puberté) au martinet fantôme qui menace l’enfant en difficulté scolaire… Le miroir, qui semble coller à la peau de Mary quelles que soient les versions, ne fait en réalité pas vraiment partie de la légende. Il n’est qu’un instrument dans son histoire, un portail qui permet ce contact entre le monde de l’Invisible (de l’imaginaire peut-être aussi) et nous. J’en parle avec plus de précision dans un autre article (pas encore publié car c’est en écrivant cet autre article que j’ai dû faire une parenthèse pour écrire celui-ci, afin d’éviter le hors-sujet et … 😴 ).

Ces recherches ont fini par m’inspirer une version toute personnelle du tragique destin de Bloody Mary et de son cocktail (pas sûre qu’on y trouve une morale très profonde par contre…). Je me suis donc amusée à écrire une petite nouvelle, pas forcément originale, mais qui sait si elle ne s’inspire pas de l’une de mes vies antérieures 😏 ? Vous la trouverez ici : Birdy Mary : l’oiselle du port . N’hésitez pas à vous construire la votre, vous imaginer qui pourrait se cacher derrière cette femme ensanglantée qui aime apparaitre dans les miroirs. Aurait-elle des intentions hostiles ou vous appellerait-elle à l’aide ?


SOURCES


Contenu :

France culture : Marie Read et Anne Bonny, pirates des Caraïbes | Le journal d’une démonologue | segredos do mundo (site brésilien) | Historia de Vale do Paraiba (blog brésilien) | Haunted rooms | Metropolitant | Encyclopédie du paranormal | Les Odyssées de France Inter | Horror Scaryweb | cultea.fr | Wikipédia | Lesavaistu.fr

Images :

IMAGE A LA UNE : Compositing personnel à partir d’images libres de droit | Pinterest : Ernest et Mary Hemingway | Gravure d’Alexandre Debelle, tirée du livre « Histoire des pirates et corsaires de l’Océan » de Christian Pitois | Statues d’Anne Bonny et Mary Read aux Bahamas (photo Pinterest) | « Queen Mary Tudor » Tableau des Museums Sheffield fourni par The Public Catalogue Foundation | Bloody Mary par l’artiste Serafin Ureno | « Lenda – Legend » de Leila Lil (@leila.lil.art sur Instagram) Illustration à l’encre réalisée pour le Inktober 2018 | Portrait de Maria Augusta de Oliveira – source inconnue | Toire no Hanako-san – galerie Flickr de l’artiste IssyBJD | Yurei par Sawaki Sushi (1737) |

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